Par Ilaria Casillo, vice-présidente de la CNDP, dans le cadre de son intervention à la table ronde « Comment relever le défi de l’acceptabilité ? »
Pour en finir avec "l'acceptabilité" des projets ?
Les enjeux posés par les transitions écologique et énergétique donnent une place majeure aux projets d’EnR (énergies renouvelables). La mise en place de ces derniers pose des questions en matière, entre autres, d'intégration dans les territoires d’accueil. Face aux résistances et aux oppositions de certaines communautés locales ou collectifs nationaux, de nombreux acteurs - porteurs de projet tout comme autorités publiques - se posent de plus en plus la question de "l'acceptabilité" des projets d'énergie renouvelable.
Pourtant, ce terme reçoit de nombreuses critiques. Pourquoi ? Si, derrière le terme et la notion d’acceptabilité, chaque acteur met une signification différente, il semble renvoyer à une idée centrale : le projet doit être réalisé et accepté. La perspective est donc bien celle du porteur de projet.
Mais, est-ce la bonne manière de s'y prendre ?
Acceptabilité ou "faisabilité sociale" ? Du glissement sémantique au changement de posture.
Parler d'acceptabilité des projets pourrait renvoyer en effet à une vision descendante et unilatérale de la concertation et de la participation. Descendante, car cela donne l'impression qu'il s'agit d'arriver sur un territoire avec un projet prêt à être réalisé et accepté tel quel. Unilatérale, car le terme évoque l'idée d'une proposition, d'une offre qu'une partie fait à une autre et qui serait à prendre (accepter) ou à laisser (refuser / s'opposer) ; ainsi conçue, l'acceptabilité relègue les personnes appelées à s'exprimer sur un projet à une posture passive consistant à répondre à la question de l'acceptabilité par un OUI ou par un NON. Or, dans une démarche de participation, ce qui compte c’est comprendre quelles sont les conditions qui permettraient qu'un projet puisse ou non s’intégrer dans le territoire, bénéficier à la collectivité, avoir des impacts réduits sur l'environnement. Ce qui compte, c’est comprendre quel serait le "oui, à condition que..." et le "non, sauf si..."
L’expérience de la CNDP montre que concevoir et pratiquer la concertation comme un outil favorisant un travail collectif sur la faisabilité sociale des projets, plutôt que sur leur acceptabilité, permet de reconnaitre que chaque partie est force de proposition, a des conditions à mettre sur la table, des réserves, des attentes, des craintes. Il s'agit de sortir de la logique binaire du « pour / contre ».
Adopter une approche de faisabilité sociale des projets peut s’avérer utile aux territoires concernés, au décideurs, aux transitions et à la qualité des décisions.
- Publié le 01/12/2022
- Date de dernière mise à jour : 02/12/2022